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Articles

Affichage des articles du 2022

Hello Peter. Pas de nouvelles?

Bon, Peter, Peter Prout, je viens de découvrir que tu es décédé il y a un an et un mois. Je me rappelle assez bien notre première rencontre. Je crois même avoir écrit à ce sujet à l’époque. Je sais t’avoir mentionné plusieurs fois. Donc, j’étais à la terrasse de Vivo Daily stand, Avant le Covid, Avant Jésus Christ, avec un exemplaire du London Review of Books bien en vue. Tu es arrivé avec un couple de japonais et vous avez discuté à la terrasse. J’ai tout entendu sans même écouter. Il était question d’un déménagement, de ton déménagement. Le couple était probablement agent immobilier. Ils sont partis, tu es resté, tu n’as pas déménagé au final, nous avons engagé la conversation, nous avons rapidement trouvé un point commun avec une certaine passion aujourd’hui un peu élimée au sujet d’Henry Miller, tu m’as montré avec gêne ou timidité une autre fois quelques exemples de tes peintures, tu enseignais l’anglais avec dégoût parce qu’il est ici plus facile d’enseigner l’anglais avec dégoû

Conversation de comptoir - extrait

K nous a dit qu’il était de nationalité chinoise, à l’origine, nonchalamment. Nous avons atteint ce niveau de familiarité.  Sa relation de soi dans l’axe d’une histoire qui le dépasse, qui va au-delà de sa génération - ce que nie, négative, zappe par exemple le terme massivement idiot de “half” en japonais - j’y reviendrai - m’aura permis de remettre sur le comptoir ma conversation entamée ailleurs une autre fois avec M assis à ma gauche, sur la présence ou pas d’un autel consacré aux ancêtres dans leurs appartements respectifs. M m’avait déjà répondu par la négative. A Tokyo en tout cas, il n’en avait pas, mais dans la maison ancestrale en province oui. J’ai donc posé la même question à K qui m’a répondu par la négative, pour poursuivre sur le fait que son père : - était chinois. - avait été arrêté par l’armée japonaise. - avait été déporté à Hokkaido pour travailler comme _esclave_ dans les mines de charbon. A noter que le terme “esclave” est ici un ajout personnel. - n’avait pas vou

Recension - extrait

(…) Le recenseur du livre d’Olivia Rosenthal, Un singe à ma fenêtre : La narratrice veut enquêter sur les attentats terroristes commis dans le métro de la capitale japonaise par la secte Aum. Ce, pour ne pas risquer d’être « aspirée et engloutie et submergée par quelque chose de trop proche » qui s’est déroulé en 2015 à Paris. Olivia Rosenthal voit son dossier accepté et elle part à Kyoto. Elle y résidera le plus souvent. Phrase extraite d’un article sur En attendant Nadeau Singeant l’auteure du livre, le recenseur ne nomme pas non plus la Villa Kujoyama. On se demande quelle est la source de cette pudeur. L’auteure elle procède à un début quelque peu en fanfare avec un usage immodéré du pronom “on”, mais aussi, sept répétition de la phrase “les membres du jury acquiescent” au sujet de tous ses arguments concernant son projet. S’agit-il de tancer? Est-ce un clin d’oeil réservé aux entres-soi?Une petite pique à la pointe émoussée pour n’irriter ni la chèvre ni le chou? Cela fait sourir

Manquer la diligence

De bon matin, soleil luisant, ciel radieux, mont Fuji avec de la mousse au sommet du bol à raser. Je me dirige vers l’arrêt de bus en contrebas à cinq minutes à peine à mon rythme, rapide, d’autant plus que cela descend. Je croise et dis bonjour à la même dame âgée que la dernière fois, qui remonte la pente, qui me sourit, qui vue à distance quand il est encore difficile de distinguer les traits, ressemble, ou plus exactement, fait penser à une clocharde au moment où le malaise vous force à envisager couard même si brièvement qu’il faudrait changer de trottoir. De proche, elle n’est pas clocharde, mais ses habits comme sa coiffure démontrent que le maintien et le soin de soi pour les autres n’est plus du tout un sujet. Elle a un beau sourire que je lui rend, et sans m’arrêter, je fais une remarque sur le beau temps frais que l’on a ce matin.  Trop de moi, trop de je, mais c’est un journal, non? Il est 6:55 environ quand j’arrive devant l’arrêt de bus en pleine campagne, plus exactement

Sans titre - extrait - août 2022

Le voyage court déborde de sa durée in situ, inclut les temps d’anticipation, de conjecture, cette négociation avec soi - tout ce réflexif -  sur les lieux où aller pour des raisons pragmatiques d’achats, des impasses à s’imposer pour ne pas faire des détours inutiles - alors qu’en temps normal, l’inutile est justement la dimension luxueuse- cette casserole à cuire le riz qui siéra certainement pour des riz mitonnés m’attend à Koenji mais ce sera la semaine suivante, dans la boutique de quincaillerie, une pure jus d’époque donc un pieds dans l’antérieur, un intérieur pas refait ou alors il y a longtemps et qui ne survivra pas, étant fermée les mercredis. Donc ce passage à Tokyo est en réalité bien plus long dans une durée qui déborde entre l’avant et l’après.  On me ramène en bas plus tôt que d’habitude. Shinjuku à 18h30, ce qui permet en une station supplémentaire de débarquer à Okubo. Avec la grosse valise heureusement vide, c’est comme si débarquer de l’étranger, de revenir au pays

Tokyo en parcimonie - extrait - août 2022

La forme verbale préférée du réseau ferroviaire Odakyu est la négation de pouvoir. Le nombre d'impossibles que propose cette entreprise est considérable. Très aimables au comptoir par contre. Cette capacité à gérer l'inefficacité organisée au point qu'elle semble être son contraire,  efficace. Kafka a vu se produire des acrobates japonais - le fameux exercice d'équilibre, de force et de voltige - en 1910, une hypothèse même si la date précise ne figure pas dans une des premières entrées (on dit cela?) de son journal. C'était les prémices de Japon Expo. Le petit Marcel avec sa tasse de thé et ses fleurs en papier qui s'y déploient est antérieur donc. 1910, c'est aussi l'année où Swingle aurait pu venir au Japon en catimini. Le journal de Kafka dans l'édition NOUS, familiarité immédiate, et un volume d'une épaisseur considérable et d'un poids négligeable. Parfaite lecture de voyage. 32 heures à Tokyo : ce qu'il ne faut pas manqu

Romance Car Café

Une nouvelle entrée sur  Où écrire à Tokyo  : le Romance Car Café dans la station Odakyu Shinjuku.

Des lucioles plein la bouche - extrait - 2019

“Pour l’udo en salade, on pêle les tiges, on les découpe en copeaux et on les fait tremper dans de l’eau glacée une heure ou plus avant de les servir avec un assaisonnement à la française. Quand servis sur des canapés comme les asperges, il faut changer l’eau de cuisson deux ou trois fois avant que de les incorporer dans la sauce. La crème d’udo en soupe est particulièrement délicieuse, mais dans ce cas aussi on doit changer la première eau de cuisson.” Traduit de The World was my Garden - Travel of a Plant Explorer, par David Fairchild. Réimpression de 1938. Une recette à essayer donc. Si je m’en tient aux dires de YKK, l’intérêt du lecteur dans cette traduction en haut n’est éveillé qu’au moment où apparaît l’assaisonnement à la française, c’est à dire qu’un lien affectif, une corrélation avec le lecteur, en priorité avec sa nationalité, est quasi sine qua non pour intéresser un éditeur. C’est un phénomène mondial. Un petit ou grand “nous” expressement plutôt que subliminalement expr

Marcher sous la pluie - extrait - juillet 2022

Les chemins n’ont pas de nom mais des indices, qui m’échappent. Quand on me demande où je marche, je suis pris de court. Toujours aucune idée où se trouve cette fameuse maison bleue vue sous un ciel splendide l’autre fois. Mais c’est bien simple, elle se trouve hors de mon chemin. Pas de doute sur ce point. Ici, il faut penser le terrain par élimination alors qu’une maison bleue vue ne serait-ce qu’une seule fois à Tokyo serait inscrite dans la mémoire en fonction d’autres indices, nom de quartier, de station, ou quelque chose de l’ordre de _dans ce coin là-bas_. Vous marchez où? Dans ce coin là-bas. Ah oui, le chemin de promenade des chiens. Voilà comment on devient canin. J’en ai vu un ce matin d’ailleurs à distance avec son maître. Il était tôt, il pleuvotait. Et puis le _otait_ est passé au stade de _quasi-dru_. C’est là que plusieurs choses sont apparues :  d’abord et avant tout le plaisir de marcher sous la pluie, avec une parka qui tient la route moins d’une heure, une casquette

De l’acupuncture urbaine - extrait - juillet 2022

La ville est un corps de circulation d’énergie, conflictuelle, laborieuse, irritante, adorée, honnis, tout à la fois. Soi est lié à ce corps de par le mouvement, de par les savoir-villes accumulés. Pour influer sur le Yin et le Yang urbains connaissant un paquet de méridiens, le marcheur en ville se doit de sélectionner et apprécier des points d’acupuncture qui lui sont particulièrement sensibles. Et d’y revenir tant qu’il peut. Le petit carrefour avec le Dream Coffee à un angle entre la rue Rikkyo et une autre sans nom qui dégringole à plat plein sud vers le square Nishi-Ikebukuro est un de ces points vitaux. Un point vital urbain dans le corps de la ville est un lieu dans lequel le doute n’a pas lieu d’être. C’est ici, j’y suis. Perec y tournerait des heures carnet en main. On peut se poser dans l’alcôve juste à côté de l’entrée du café, s’assoir ainsi à même la rue mais un peu protégé comme si une casemate de gardien de la paix des carrefours. Que la paix des carrefours soit. On pe

Habitudes, lieux, amitiés - extrait - juillet 2021

Il pleut de ces pluies qui mettent en évidence le monopole de l’imperméabilité des sols. Vastes flaques et cataractes. On va entendre parler des glissements de terrains dans les provinces pentues, là où l’imperméabilisation n’est que partielle.  “Il est impardonnable de voyager – et même de vivre – sans prendre de notes”, dixit Kafka. Bon mais Frank franchement, faut être de son temps. Il y a la photo aussi, la mémoire, ses affabulations, ses inventions. Pour un café, c’est quand tu veux. Recension d’ouvrages de Jean-Christophe Bailly. _« 15 novembre 1979, Même si, de fait, je ne suis ici que de passage, je me rends compte que j’habite pleinement New York, y ayant des habitudes, des lieux, des amis »._ Tout est dit donc. Le seul voyage qui aille. Triptyque: habitudes, lieux, amitiés. Le tourisme lui se construit sur l’absence de ces trois éléments à destination, d’où l’impératif, le diktat des _expériences_, l’incontournabilité des vélos de location, partout. Ne pas se fixer. La desti

Sur l’esquive à Tokyo - extrait - juin 2022

A Tokyo, il ne s’agit pas de savoir s’éloigner au plus vite d’une nappe de lacrymogène, d’une charge des autorités, d’une foule en colère ou en mode hyperédonisme de bande exultante. Associer au savoir-ville le savoir s’esquiver est dans ces conditions un luxe enviable. Le savoir s’esquiver est ludique quand il s’exerce hors l’urgence. Mais il participe de la même grande idée dès lors qu’il s’agit de sauver sa peau. Savoir de maraudeur, de résistant, de marginal mobile et stratégique, d’assassin même. Pour l’instant aucune piste cherchée pour nourrir la reflexion sur l’esquive en ville, le savoir-s’eclipser, hormis trois choses qui sentent leur redite : 
 - (…) ces  familles patriciennes exilées volontaires au coeur de la Sicile pour s’éloigner de la Rome trop politique et complotiste, qui font reproduire au milieu de nullepart des villas romaines somptueuses. - Casanova, le cas Casanova qui part, quand cela cloche, s’avère dangereux, a perdu en charmes. Apparemment sa signature est le

Un jardin habité - février 2022 - extrait

####La veille de cela A est décédé. Il y a des chances que la veille encore il était aux jardins, les jardins maraîchers communautaires proches de sa maison. On le saura bientôt, on saura les circonstances. Il s’avère qu’ici, un décès à domicile s’accompagne systématiquement de la menace d’une autopsie. Il est donc suspect de mourir chez soi mais pas à l’hôpital. Enfin, c’est ce que je suppose. Mais sachez qu’il roulait les r, qu’à l’ouest de Tokyo est un accent chez certaines personnes âgées qui n’a rien à envier à l’Ardèche. Ceci dit, c’est à dire ceci écrit, il n’y a aucune raison particulière de citer l’Ardèche qui m’est inconnue y compris ses accents. C’est le seul nom avec un r à rouler qui me soit venu en tête. Le Berry aussi. J’ai retrouvé une vidéo de 57 secondes, réunion familiale, déjà plusieurs heures de boissons sous le capot, les buveurs compères hilares et pépères, A debout à faire un discours de commande incompréhensible - cela devait être un anniversaire, A en tenu qu

Tokyo : Le retour des figures narratives - extrait

C’est le retour à la normal même si à petites foulées, et donc le retour des figures imposées, des narrations dictatoriales douces, qui dictent. Qui dictent ce que Tokyo est. Et ce n’est même pas à prendre ou à laisser. C’est à prendre uniquement, ou à s’éloigner tant qu’il est encore possible. Tokyo à la croisée de la modernité et de la tradition. Ce vieux violon, cette pensée de vieux hommes et d’influenceuses en complicité, cette fixitude. Ce poster sur le quai de la station Ueno - très belle gare - sur la ligne Ginza en direction d’Asakusa, était-il ici en permanence ou est-ce un revenant? A Asakusa comme presque partout ailleurs se poursuit le cancer du renouvellement avec des devantures beiges et fond béton, des espaces commerciaux vides mais justes achevés, ou achevés il y a des mois de cela, mais attendant la reprise qui vient. Boutique de churrasco, entre tradition et modernité. Seule demeure encore la fixitude des tracés, mais comme ailleurs, un équilibre est en train de se p

Dans les interstices - novembre 2021

####Dans les interstices Il faut une population bien plus large, des vécus bien plus multiples et singuliers pour qu’émerge une autre littérature japoniste, une littérature territorialisée (voir la note plus bas)  parce que l’auteur n’est pas de passage mais résident comme l’était Bouvier par exemple, ce qui, n’oublions pas, n’empêche pas de produire de la littérature qui n’a rien à voir avec son milieu de vie. Pourquoi faudrait-il nécessairement écrire sur Marseille parce que l’on réside près du port? L’écriture se révèle là évidemment plus voyageuse que la photo par exemple qui est liée au lieu présent. (Note) Littérature territorialisée, oui et non. La dimension hors-soliste - une littérature dé-territorialisée _ET_ consciente de l’être - avec son bilan carbone désastreux, les frequent flyers, comme catégorie et approche distincte de l’écrit n’a sans doute pas encore décollé des poncifs. Décoller du registre sempiternel de _vue de ma chambre d’hôtel à Shinjuku, vu du train sécurisé

Péridurale de la conscience - novembre 2021

#### L’urbain totalitaire Une course m’amène chose rare à Shibuya par la sortie A6c qui débouche sur le côté gauche de l’avenue Koen Dori en montant, très proche donc du carrefour magnétique. La première surprise est la densité humaine, et sa vélocité, à ce niveau du territoire il me semble un brin plus dense, un brin plus rapide qu’à Shinjuku par exemple, si l’on prend Shinjuku comme jauge. Ces deux facteurs surprennent parce que je les associe naturellement aux week-ends nécessairement plus bondés, alors que nous sommes un mardi. Shibuya pulse donc au rythme du week-end même en semaine.  La seconde surprise, enfin pas vraiment comme c’est de constatation sans affect dont il s’agit, est la signature sonore et visuelle caractéristique de Shibuya, qui ne se retrouve pas dans les noeuds de communications denses de Shinjuku, Ikebukuro ou Ueno par exemple où le sonore marchand est faible en rapport aux seuls bruits et lumières de la ruche urbaine. Cette signature à Shibuya est associée aux

Dérangements : prélude - extrait - janvier 2021

Le dernier Quintane, La cavalière, remugle (présent de l’indicatif du verbe remugler) à la surface quelque chose des années 70, la prof d’Allemand blonde genre Miou Miou qui te trotte dans la tête en permanence, le passage du vouvoiement au tutoiement, la bise aussi, un acte révolutionnaire. Qu’on était allé avec M et sur invitation dans son appartement de la rue Monsieur Le Prince. Que son homme qui passait par là avait un air un peu supris mais conciliant, bon ça passera. Qu’il n’y eut pas vraiment de suite. Que de part et d’autre, cette tentative d’égalité au-delà des générations - et des strates d’autorité - était un peu maladroite. Que c’était notre relent-expérience de mai 68 qu’on n’avait pas vécu, sinon que par clameurs lointaines et diffuses sur les hauteurs de Belleville dans un Paris sinon silencieux et tendu. Que ça a fait rêvé tout de même. Que le Jardin du Luxembourg proche n’était pas cet aimant aimé qu’il devint bien plus tard. Que M était devenu ultérieurement enseigna

Grands espaces et enfermement - extrait - juin 2022

(…) L’ouvrage A Tokyo Romance de Ian Buruma paru l’an passé offre au lecteur un goût de ce qu’était séjourner au Japon, et d’abord Tokyo, dans les années 70. Il est aussi en partie un nouveau portrait de Donald Richie moins la pudeur et la bienséance éditoriale. L’auteur qui part jeune au Japon est mis en garde de ne pas fréquenter Richie et sa clique. Ce qu’il ne manque pas de faire immédaitement. Une photo de Richie bien plus jeune que le portrait figé du vieil homme aux cheveux gris figure dans le livre. On y voit un Richie libertin, pervers, maître du moment, un portrait de nuit suant le sexe, la sueur, la promiscuité qui sont une grande thématique des souvenirs de l’auteur. Mais tout ceci est écrit en mode post-ménopause donc dénué de libido et de bravado. Et aussi dénué de ton nostalgique, ce qui n’est pas plus mal. Buruma passe de relations personnelles à des généralités et définitions qui font de l’ouvrage un canevas un peu décousu. Son analyse de la fascination réciproque Ja

Allumés des mégots - 31 mai 2020

Gertrude l’oeil hommasse, la main poupine tenant le phone smart marmonne “an app is an app is an app”. Sur le même divan, Alice saisit entre son pouce et l’index quelques poils de sa moustache, regardant aussi son écran avec une moue et les sourcils froncés qu’elle a épais. “25 grammes de beurre! This must be wrong!”. Ernest est un des rares sans mobile qui regarde avec dédain comme il se doit les toiles de Matisse et Cézanne au mur. Qui oserait boxer dans de tels paysage? Picasso vient d’arriver. Pablo donc. Il cherche la femme. Seules dans sa perspective se trouvent Gertrude et Alice. Elles sont disqualifiées. Par dépit et habitude, il saisit son smartphone de la pochette de sa chemisette blanche de toile de coton montée en Espagne et va voir quelques sites pornographiques africains pour inspiration. Francis Scott est aux manettes au petit bar goûtant les whiskies qu’il connait pourtant par choeur. Il est plus calme que d’habitude, Zelda étant en cure. James est un autre allergique

Gros son - extrait - mai 2022

Ça commence. Koenji Central Parc. Rien qu’un square. Sur le chemin, des flamboyants se dirigent dans la même direction, de sacrées crinières, de sacrées dégaines, des oiseaux de nuits exceptionnellement visibles de jour. Je ne connais de Koenji que le jour mais il est clair que ce jour là est exceptionnel. Les hiboux sont de sortie dès 14 heures. Ils sont de sortie pour la manif, le carnaval, la marche contre la gentrification du quartier, _gentrification_ en anglais dans le texte. En japonais, ça n’est que du redéveloppement 再開発, très faible expression.  Des flamboyants mais peu de flamboyantes. Tenues de boutiques vintage de seconde main. Un côté seventees bon enfant. Pas de maquillage sinon que carnavalesque. Peu de flamboyantes donc, mais des amazones, rares, félines, racées, la démarche puissante, le centre de gravité bas, de longues jambes, ventres plats, regards clairs.  Le service d’ordre est imposant. Tant et tant de flics en trois catégories : les en uniformes standards, les

Koenji sur Manhattan - extrait - mai 2022

“But the curious thing about New York is that each large geographical unit is composed of countless small neighborhoods. Each neighborhood is virtually self-sufficient. Usually it is no more than two or three blocks long and a couple of blocks wide. Each area is a city within a city within a city. Thus, no matter where you live in New York, you will find within a block or two a grocery store, a barbershop, a newsstand and shoeshine shack, an ice-coal-and-wood cellar (where you write your order on a pad outside as you walk by), a dry cleaner, a laundry, a delicatessen (beer and sandwiches delivered at any hour to your door), a flower shop, an undertaker’s parlor, a movie house, a radio-repair shop, a stationer, a haberdasher, a tailor, a drugstore, a garage, a tearoom, a saloon, a hardware store, a liquor store, a shoe-repair shop. Every block or two, in most residential sections of New York, is a little main street. Here is New York, E.B. White, 1949 Depuis quelques jours, je me balade