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Articles

Affichage des articles du juin, 2022

Un jardin habité - février 2022 - extrait

####La veille de cela A est décédé. Il y a des chances que la veille encore il était aux jardins, les jardins maraîchers communautaires proches de sa maison. On le saura bientôt, on saura les circonstances. Il s’avère qu’ici, un décès à domicile s’accompagne systématiquement de la menace d’une autopsie. Il est donc suspect de mourir chez soi mais pas à l’hôpital. Enfin, c’est ce que je suppose. Mais sachez qu’il roulait les r, qu’à l’ouest de Tokyo est un accent chez certaines personnes âgées qui n’a rien à envier à l’Ardèche. Ceci dit, c’est à dire ceci écrit, il n’y a aucune raison particulière de citer l’Ardèche qui m’est inconnue y compris ses accents. C’est le seul nom avec un r à rouler qui me soit venu en tête. Le Berry aussi. J’ai retrouvé une vidéo de 57 secondes, réunion familiale, déjà plusieurs heures de boissons sous le capot, les buveurs compères hilares et pépères, A debout à faire un discours de commande incompréhensible - cela devait être un anniversaire, A en tenu qu

Tokyo : Le retour des figures narratives - extrait

C’est le retour à la normal même si à petites foulées, et donc le retour des figures imposées, des narrations dictatoriales douces, qui dictent. Qui dictent ce que Tokyo est. Et ce n’est même pas à prendre ou à laisser. C’est à prendre uniquement, ou à s’éloigner tant qu’il est encore possible. Tokyo à la croisée de la modernité et de la tradition. Ce vieux violon, cette pensée de vieux hommes et d’influenceuses en complicité, cette fixitude. Ce poster sur le quai de la station Ueno - très belle gare - sur la ligne Ginza en direction d’Asakusa, était-il ici en permanence ou est-ce un revenant? A Asakusa comme presque partout ailleurs se poursuit le cancer du renouvellement avec des devantures beiges et fond béton, des espaces commerciaux vides mais justes achevés, ou achevés il y a des mois de cela, mais attendant la reprise qui vient. Boutique de churrasco, entre tradition et modernité. Seule demeure encore la fixitude des tracés, mais comme ailleurs, un équilibre est en train de se p

Dans les interstices - novembre 2021

####Dans les interstices Il faut une population bien plus large, des vécus bien plus multiples et singuliers pour qu’émerge une autre littérature japoniste, une littérature territorialisée (voir la note plus bas)  parce que l’auteur n’est pas de passage mais résident comme l’était Bouvier par exemple, ce qui, n’oublions pas, n’empêche pas de produire de la littérature qui n’a rien à voir avec son milieu de vie. Pourquoi faudrait-il nécessairement écrire sur Marseille parce que l’on réside près du port? L’écriture se révèle là évidemment plus voyageuse que la photo par exemple qui est liée au lieu présent. (Note) Littérature territorialisée, oui et non. La dimension hors-soliste - une littérature dé-territorialisée _ET_ consciente de l’être - avec son bilan carbone désastreux, les frequent flyers, comme catégorie et approche distincte de l’écrit n’a sans doute pas encore décollé des poncifs. Décoller du registre sempiternel de _vue de ma chambre d’hôtel à Shinjuku, vu du train sécurisé

Péridurale de la conscience - novembre 2021

#### L’urbain totalitaire Une course m’amène chose rare à Shibuya par la sortie A6c qui débouche sur le côté gauche de l’avenue Koen Dori en montant, très proche donc du carrefour magnétique. La première surprise est la densité humaine, et sa vélocité, à ce niveau du territoire il me semble un brin plus dense, un brin plus rapide qu’à Shinjuku par exemple, si l’on prend Shinjuku comme jauge. Ces deux facteurs surprennent parce que je les associe naturellement aux week-ends nécessairement plus bondés, alors que nous sommes un mardi. Shibuya pulse donc au rythme du week-end même en semaine.  La seconde surprise, enfin pas vraiment comme c’est de constatation sans affect dont il s’agit, est la signature sonore et visuelle caractéristique de Shibuya, qui ne se retrouve pas dans les noeuds de communications denses de Shinjuku, Ikebukuro ou Ueno par exemple où le sonore marchand est faible en rapport aux seuls bruits et lumières de la ruche urbaine. Cette signature à Shibuya est associée aux

Dérangements : prélude - extrait - janvier 2021

Le dernier Quintane, La cavalière, remugle (présent de l’indicatif du verbe remugler) à la surface quelque chose des années 70, la prof d’Allemand blonde genre Miou Miou qui te trotte dans la tête en permanence, le passage du vouvoiement au tutoiement, la bise aussi, un acte révolutionnaire. Qu’on était allé avec M et sur invitation dans son appartement de la rue Monsieur Le Prince. Que son homme qui passait par là avait un air un peu supris mais conciliant, bon ça passera. Qu’il n’y eut pas vraiment de suite. Que de part et d’autre, cette tentative d’égalité au-delà des générations - et des strates d’autorité - était un peu maladroite. Que c’était notre relent-expérience de mai 68 qu’on n’avait pas vécu, sinon que par clameurs lointaines et diffuses sur les hauteurs de Belleville dans un Paris sinon silencieux et tendu. Que ça a fait rêvé tout de même. Que le Jardin du Luxembourg proche n’était pas cet aimant aimé qu’il devint bien plus tard. Que M était devenu ultérieurement enseigna

Grands espaces et enfermement - extrait - juin 2022

(…) L’ouvrage A Tokyo Romance de Ian Buruma paru l’an passé offre au lecteur un goût de ce qu’était séjourner au Japon, et d’abord Tokyo, dans les années 70. Il est aussi en partie un nouveau portrait de Donald Richie moins la pudeur et la bienséance éditoriale. L’auteur qui part jeune au Japon est mis en garde de ne pas fréquenter Richie et sa clique. Ce qu’il ne manque pas de faire immédaitement. Une photo de Richie bien plus jeune que le portrait figé du vieil homme aux cheveux gris figure dans le livre. On y voit un Richie libertin, pervers, maître du moment, un portrait de nuit suant le sexe, la sueur, la promiscuité qui sont une grande thématique des souvenirs de l’auteur. Mais tout ceci est écrit en mode post-ménopause donc dénué de libido et de bravado. Et aussi dénué de ton nostalgique, ce qui n’est pas plus mal. Buruma passe de relations personnelles à des généralités et définitions qui font de l’ouvrage un canevas un peu décousu. Son analyse de la fascination réciproque Ja