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Affichage des articles du décembre, 2023

Modes d’appropriation de Tokyo

Décidément, cette fiction sur Swingle revient sur le carreau en mode non-fictionnel et imprévu. J’avais tantôt osé envoyer une missive à un comité d’étude du Hassaku sur son île natale Innoshima, d’où l’on m’avait signifié sèchement avant le covid que je n’étais pas bienvenu, missive signalant mon doute sur cette photo de groupe montrant un grand dadais blanc, caucasien donc, comme étant Swingle lui-même en visite sur les lieux dans les années 15 et quelques. J’arguais qu’il ne ressemblait pas du tout à Swingle qui était au contraire et certainement l’auteur de la photo, et donc invisible sur le cliché. Je le mentionnai dans un courrier spontané. Cela créa une commotion. On me fit miroiter une demande de conférence, mais sur quoi donc, n’ayant aucune qualité? Dans le mail reçu à cet effet, on m’écrit que quelqu’un qui a des connaissances, 知識人, assure que Swingle serait bien venu au Japon en 1900, et donc que sa visite en 1915 serait la seconde, et qu’une visite en 1910 releverait vraim

Ce que seraient les conditions d’écritures à Tokyo

La photo dit en quelque sorte : c’est maintenant ou jamais. C’est confus comme de bien entendu mais tout a débuté par cette bribe de phrase dans La littérature embarquée de Justine Huppe, en page 105 dans le si bien nommé chapitre Le raffinement de la brute. Ce moignon est ceci, qui manque certes de contexte, mais laissez-vous porter :  “A première vue, ces dynamiques atteignent donc directement nos puissances de luttes mais aussi nos capacité de figuration.” Il faut lutter contre le vague pour saisir ce que seraient les conditions d’écritures à Tokyo, lutte dont l’absence entretient le flou qui empêche mais si peu somme toute d’entrevoir des figurations de narrations possibles; lutte dont le synonyme serait lucidité, donc lutter contre les brumes. Quelque chose en parallèle est venu percer l’abcès qui une fois la première douleur passée expose un paysage de possibles autres. J’y viens de ce pas. Récemment, pour contrer la dépendance oxycontinique aux fils d’informations tendu(es) qui

Le quotidien 1

B nous a fait parvenir une cargaison de ces mochi de riz complet, comme si à peine battu, qui offrent une texture peu élastique et surtout ne stresse pas l’idée de déglutir. Il faut 10 minutes pour faire un plat principal de mochis revenus à la poêle, avec de l’huile d’olive, un ponzu express avec l’acide du moment - une grenade qui allie le sucré du mirin et l’acide d’un agrume et permet de faire d’une pierre deux coups - et en parallèle un daikon, de préférence un karamidaikon pas nécessairement fort au goût mais peu riche en eau et donc qui ne suinte presque pas - inutile d’essorer - qui une fois râpé constitue une salade rafraîchissante à lui seul.  La râpe en bois récente qui est probablement d’un modèle ancien pas ergonomique et qui entre dans cette tendance strictement urbaine de nostalgie écologique consumériste s’affabulant sur des objets en bois - beaucoup d’efforts musculaires requis - produit un râpé brisé qui permet de manger beaucoup de ce légume sans que la bouche se las

Familiarité

En arrivant à la boutique de saké, je vois le local mouchoir de poche attenant, lumières éteintes et remplis d’un fatras de cartons et caisses de liquides. Comme la mission consiste à choisir une bouteille de Noël, je signale à S. que goûter dans ce bordel ne me dérange en rien. Le lieu fétichisé avant et pendant le covid sur la base de l’expérience d’une fréquentation avide, et donc avant la transformation en micro Apple Store qui suivit de peu la fin apparente du virus et cette course en surplace essentiellement, signature classique du mouvement dans l’espace de bureau japonais tant de fois observé et consistant à exposer aux collègues l’énergie et la probité dépensées à cet instant même dans un théâtre de l’inutile, mouvement théâtral donc qui se traduisit par une reprise en main du présent signifiant l’effacement total et sans consultation aucune des habitués du passé ribosome dans le présent routinier agréable et réparateur d’un lieu apprécié par ceux-ci parce que justement immuab

En ruralité

L’homme du chai de saké enclenche le monologue en zappant les courtoisies d’usage. La visite d’un groupe d’étrangers déshumanise les deux bords. Au-delà de trois visiteurs, il n’y a plus d’introduction de soi en tant que porteur d’un nom de famille, d’un prénom et d’une identité sociale succincte mais singulière par définition. Pour interpréter l’intro de manière à produire une narration qui tient la route, le début d’une histoire, il faut vite des réponses à qui quoi quand où depuis quand. Pourquoi viendra plus tard. Presque systématiquement il faut aller à la pêche aux éléments absents pour faire sens. Mais lui a franchi un pas de plus. Il zappe tout. Il évoque d’abord avec moi seul comme témoin la situation menaçante de la production de saké. Son monologue semble tourner en une boucle dont le mouvement circulaire a débuté avant même notre arrivée sur les lieux. Le réchauffement qui s’est accumulé au cours des années précédentes a maintenant un impact sensible et déstabilisant. Il me

Marcher vite à Kyoto

Portes closes au Café Indépendants, ce qui n’est pas totalement un mal, bien compensé par le Tully’s de Sanjo en face. Lieu studieux rempli d’étudiants. Ensuite, c’est le choc, le malaise, la redécouverte de la galerie marchande Teramachi Kyogoku en mode post-covid. La signature japonaise s’y est considérablement édulcorée. Jeans, sucre et bêtisiers.  Aussi, opticiens et chaînes nationales. Koenji à Tokyo dépasse maintenant Teramachi Kyogoku au rayon charme. Même Tonkatsu Buta Gorilla a basculé dans la viande reconstitué pour les touristes majoritaires. Seule méthode pour compenser : marcher vite, adopter un rythme de croisière autre que le tout venant touristique, prétendre être kyotoïte affairé, et s’échapper au sud.  Dans les jours qui suivent, c’est quantité d’aller-retours pressés de Kiyamachi-dori presque au niveau de Len jusqu’au pont de Shijo puis à l’est jusqu’aux abords de Gion. Enoncer les noms des lieux, et marcher vite, pour se refamiliariser avec le territoire en jouant l