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Tokyo : Le retour des figures narratives - extrait




C’est le retour à la normal même si à petites foulées, et donc le retour des figures imposées, des narrations dictatoriales douces, qui dictent. Qui dictent ce que Tokyo est. Et ce n’est même pas à prendre ou à laisser. C’est à prendre uniquement, ou à s’éloigner tant qu’il est encore possible. Tokyo à la croisée de la modernité et de la tradition. Ce vieux violon, cette pensée de vieux hommes et d’influenceuses en complicité, cette fixitude.

Ce poster sur le quai de la station Ueno - très belle gare - sur la ligne Ginza en direction d’Asakusa, était-il ici en permanence ou est-ce un revenant?

A Asakusa comme presque partout ailleurs se poursuit le cancer du renouvellement avec des devantures beiges et fond béton, des espaces commerciaux vides mais justes achevés, ou achevés il y a des mois de cela, mais attendant la reprise qui vient. Boutique de churrasco, entre tradition et modernité. Seule demeure encore la fixitude des tracés, mais comme ailleurs, un équilibre est en train de se perdre au bénéfice des chaînes. Pour ne pas le remarquer c’est simple : il suffit de ne pas y penser et porter son regard plutôt en hauteur, à angle de 30%. Il suffit de choisir ses heures. Et le tour est joué. Mais jusqu’à quand? Jusqu’à quand cela va-il tenir, la certitude que le covid a été une occasion sinistre mais radicale de se réapproprier des quartiers en y élaborant ses narrations propres, en plaçant ses pions sur le tapis de “je” urbain, en faisant la nique aux narrations touristiques un temps estompées, en y traçant ses propres sillages et jalons de reconnaissance et de connivence. Cela va-t-il tenir quand on m’intime de percevoir de Tokyo cet équilibre débile entre traditions et modernité? Le 7Eleven et le FamilyMart plus bas dans la galerie se situent-ils dans la tradition ou la modernité? 

En fait, cela va tenir parce qu’en parallèle aux narrations à soi, graines fixes semées sur les territoires, s’est greffée une aisance aiguisée à percevoir les connexions inter-quartiers, et partant, comment s’exfiltrer en beauté. Le savoir-ville, c’est aussi le savoir s’éclipser, se débiner, tirer sa révérence, disparaître, avec sa besace ludique sur l’épaule.

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