Accéder au contenu principal

x 0,6

Les photos du texte ont disparu.


Le 15 août passé, la rentrée débuta le 21.

Quelles belles embarcations peintes multicolores avec cette patine marquée de la pâte vintage comme on n’en voit pas à Ikéa. Peinture mate qui figurerait bien comme déco d’un comptoir nommé Le bar de la plage. Une centaine de personnes sont tombées de l’embarcation à la mer. Heureusement, elle n’a pas coulée. 

Sur la pente hier en fin de journée, un homme en costard cravate élégant la descend. Ressenti 41 degrés.

Il paraît que la NHK diffuse des messages recommandant de ne pas sortir sous la canicule entre la retransmission en direct de la traditionnelle saison de compétition de baseball interlycéenne.
(img)
Je ne sais pas si la micro-nonfiction se doit de faire dans le bon mot, le clin d’oeil et l’ironie jusqu’au cynisme. Je crois que non. Il y a Y pour cela (anciennement X).

Mais la micro-nonfiction, et la petite fiction pour qui cela chante, mérite d’être réabordée. On la réabordera.

Il paraît que l’Université des arts de Tokyo a vendu un grand piano pour faire entrer du cash dans la caisse de résonance.

Personne ne lit plus de blogs, sauf celles et ceux qui en écrivent, ce qui fait beaucoup de monde. Personne est une foule.


Après être passé par un mode de diffusion privée sous forme d’attachement pdf, j’ai rebifurqué en mode public, ayant découvert qu’il s’agit du meilleur moyen de ne pas être lu. 

Ceci dit, le cagnard a un impact tangible sur la fréquentation du café hier comme la veille où juste autour de 13 h, y trouver un siège vide n’était d’aucun problème. J’y observe le patron dans ses interactions avec des acheteurs de café en grains ou moulu qui forment une cohorte d’habitués dont certains sont clairement des consommateurs très avisés. L’autre jour une jeune femme a passé commande d’un “moulu plutôt gros”, あら目 aramé. On en apprend tous les jours.  

Au café, le siège est vraiment stratégique. Chacun offre un épisode sensiblement différent selon l’angle du quotidien qui s’y déroule.  

Je ne m’attendais pas à devoir à cet âge là m’investir dans la compréhension de ce qu’est la dyslexie, avec l’urgence associée d’avoir manqué le coche. Mais cette phrase précédente n’est là que pour le roman. La littérature sérieuse sur le sujet semble être d’abord britannique. 

La fiche Wikipédia en japonais est explicite de la vacuité du Japon sur ce sujet. La surprise n’est pas la vacuité mais l’énoncé clair sur le fait.

日本では現在のところ、ディスレクシアに関わる研究があまり進んでおらず、社会的な実態調査や実情の把握自体がなされていない状況であり、成人のディスレクシアの判定法も確立されていない。

Justement, dans Dyslexia and Counselling, Rosemary Scott, 2004, qui vient d’atterrir, il est écrit en page 5, chapitre 1 :

“... awareness of dyslexia in India only originated in the 1980s and in Hong Kong in the last ten years. Japan still denies it exists.”

Ce qui fait penser qu’un nombre sans doute important de hikikomoris sont probablement dans la dyslexie, se retirer du monde étant une tactique de protection de soi. Juste une hypothèse hein.

A l’EHPAD, trois. Jamais si fait on.


Lu en partie une série d’hommages au professeur de philosophie Roland Brunet qui avait enseigné au lycée Voltaire. Souvenir d’une discussion post-cours à même l’avenue devant le bahut presque contre le mur comme c’était courant. Il m’avait conseillé de ne pas trop être dans l’empirisme, je crois. J’ai surligné ceci dans la fin de l’éloge que lui consacre son épouse en 2003 :

“Enfin, j’évoquerai ce qu’il appelait un devoir de résistance, résistance au laisser-aller, au non respect des lois ou exigences les plus élémentaires pour que la vie en société ne soit pas le triomphe de l’individualisme. Résistance aussi aux modes imbéciles, au jeunisme, résistance à tout ce qui se veut «branché». De cette dernière résistance, aux modes, il s’était fait le reproche, justement ces jours derniers ; il l’avait estimée exagérée et l’avait mise sur le compte, disait- il, d’une forme d’orgueil : «ne pas vouloir faire comme les autres». J’avais tenté de le rassurer en lui disant que la distance que nous prenions de plus en plus, l’un et l’autre, face à un monde dans lequel nous ne nous retrouvions plus, était plutôt une forme d’inadaptation, que nous étions «un peu moyenâgeux», mais que ce qui comptait était ce rapport aux autres qui, lui, restait intact et vigilant.”

Dans le LRB en cours, dans la chronique Diary si souvent exquise, une auteure irlandaise, Anne Enright, offre un beau texte sur sa promenade unique et redondante durant le premier confinement covid avec une restriction de distance sur un rayon de 2 km. Dans le cours d’une montée en campagne, il est beaucoup questions d’odeurs :

“As I paused and looked up to the top, I caught the sweetest scent on the path so far. A small tree with dark leaves and tiny white flowers which was, I decided later, a winter-flowering box, already souring. Like all these early, insect-calling flowers, the smell held some intimation of meat and rot, despite which it was intoxicating. Some dull part of my brain had been woken by the realisation that I was alive, a fact that was constantly announcing itself, I am alive I am alive. It had something to do with the view and the rising sap of the season, but it was most suddenly provoked by the aromas of spring, corpse-like and pretty by turns, which made me rhapsodic.”


Hier soir passant dans une ruelle sombre près de la maison, quelle surprise que d’entendre le bruit de l’eau qui coule dans une baignoire en prévision du bain. Non seulement ce bruit me semble être devenu très rare, mais il s’accompagnait souvent d’effluves de savon jusque dans la rue hier absentes. L’intimité du foyer qui se diffuse ainsi dans les rues, selon la dimension olfactive, s’est largement évanouie. 

Il faut aussi être aux aguets de ces choses, comme l’autre fin d’après-midi l’autre jour dans le métro où ça sentait légèrement la sueur, la mienne peut-être mêlée à d’autres. Chamberlain avait recommandé à Lafacdio Hearn de bien noter pour ne pas qu’ils disparaissent ses premières impressions de fraîchement débarqué en navire bien sûr à Tokyo via la baie. Il y est fait mention d’une succession de surprises visuelles et jamais, dans mon souvenir, de la moindre mention d’odeurs qui devaient être endémiques et toutes nouvelles. Des odeurs japonaises.

Et puis encore via le LRB, une découverte, coïncidence, connivence majeure : Ian Nairn, a British pal, critique d’architecture et topographiste de la poésie et du je ne sais quoi des lieux de passage. Nous sommes sur la même longueur d’onde de la com-préhension de la ville comme des provinces. Seul l’alcoolisme, le sien, nous distingue. Faut-il voir dans sa re-redécouverte un quelque chose qui bouge dans l’anti-hégémonisme du discours arc-bouté sur l’angle touristique? 

Nairn à Paris en 1968 :

“The words in the songs about springtime in Paris are absolutely true – and it is a memorable experience to have banality transform itself into ideal as you sit and look, hear, smell, and taste – the whole city is urging you to greater depth of feeling, the opposite effect of a Birmingham. Tragic feeling, maybe: there is no guarantee of happiness here. But you are likely to leave more alive than when you arrived.”

Photographier la ville en optique grand angle 0,6 rend l’acte photographique moins idiot qu’il est devenu. Moins réflexe. Pas question d’y ajouter une once déjà épaisse de manipulation des couleurs ou des textures, sauf le noir et blanc du théâtre de striptease Mikado à Ikébukuro. 



Photos : paysages autour d’Ikébukuro.