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Articles

Affichage des articles du mai, 2024

Retour à Shimbashi

Une photo d’illustration serait bienvenue. 老舗 しにせ shinise, maison de tradition, un mot-clé, majeur pour aborder l’espace urbain marchand de caractère en journée, celui qui perdure dans les recoins. Shimbashi est perclu de 老舗 à condition de les voir. Il est facile de ne voir que les pachinko, les restaurants avec de vastes affiches exposant le cru de tranches de boeuf persillé, le rouge limite chirurgical de thon gras, les lieux plus discrets, plus authentiques dans l’imaginaire des ruelles. Ne manque que l’exposition en mode food porn de vagins accueillants. Mais ceci est, principalement, du soir jusqu’à tôt le matin.  A 10h du matin dans les ruelles, on se prépare. Non, ça se prépare : le quotidien. Il suffit d’y être pour en être. Seule le quotidien me sied. On sent encore mais très vaguement un fond de parties pas frais de la veille. La pâtisserie, ce nom ridiculement inapproprié pour désigner une boutique de wagashi, est du plus pur arrêt sur image. Manque le noir et blanc....

Sur la résidence d’écriture Ecrire à Tokyo

La présentation en ligne du principe d’une résidence d’écriture à Tokyo sous l’égide d’Ecrirea.tokyo ne manque pas de surprendre. Cela peut se comprendre, un peu. Pour reprendre dès le début, dans cette résidence, il n’y a pas : - De lieu dédié - De budget - De sponsor Ce n’est pas, la Villa K, la Villa de R, la Villa d’A, comme ailleurs. Ce que nous offrons : - Des clés de la ville (nous ne sommes pas propriétaires de Tokyo, mais nous faisons comme si). - Des suggestions fines basées sur du vécu, des routines et savoirs-ville de lieux propices à l’écriture (pas de Starbucks et assimilés, pas de coworking spaces et autre lieux beiges). - La possibilité de rencontres avec des acteurs d’Ecrirea.tokyo pour parler ville et écriture, et très probablement vous donner des conseils et des idées. - Ces rencontres sont conçues comme des dons, de temps d’abord. Tout le monde est occupé, personne n’est en mode pieds-à-terre à Tokyo à la belle saison avant de retourner sur la côte atlantique. ...

Rappel : Menus de la maison - Faire à manger - Faire manger - Le fait maison

  Menus de la maison - Faire à manger - Faire manger - Le fait maison Sur ce projet en cours . Il s’agit d’une liste chronologique de menus consommés à la maison à Tokyo, une expérience d’écriture blanche associée à la nourriture familiale, une forme d’expression anti-hédoniste du discours gastronomique hégémonique. Pas de recettes, de poses, de promotion produits, juste les faits du faire manger maison, du fait maison dans un foyer où la cuisine est essentiellement faite par soi-même, sans livraison de plats préparés, sans dépendance aucune aux convenient stores, avec un évitement soucieux de tout ce qui est éminement synthétique et industriel massifié, ce qui demande une vigilence permanente et n’est pas toujours évitable. La cuisine familiale est absente des conversations de ceux qui ne parlent que de gastronomie. Elle mérite l’exposition moins le narcissisme,  pour voir ce que cela fait, de quoi cela parle, peu de nourriture en fait.  Cela peut parler par exemple, de ...

Seule demeure la possibilité de l’encenser

La promenade en suspension qui se profile à l’horizon 2030 et au-delà autour des extérieurs de Ginza, Kyobashi et Shimbashi figure le simulacre classique d’une prétension à conférer un semblant de primauté aux piétons dans la ville.  Pour cela, allez à Koenji.  D’un point de vue piétonnier, Ginza au niveau du sol sur l’avenue a l’avantage du plat, qui est aussi sa source de monotonie au bout d’un moment, sauf si abrutissement par les enseignes du luxe de masse. Ce n’est pas une belle avenue. Il en existe ailleurs. Dans les rues parallèles et perpendiculaires, c’est un autre monde, surtout en soirée.  Toujours d’un point de vue piétonnier, Kyobashi est un territoire qui génère un profond malaise, pollution sonore, couleurs, aspects des immeubles, toutes ces dimensions qui pèsent sur le passant au lieu de lui faire sentir sa participation à ce grand tout qu’est la ville méritoire. La ville ne peut être méritoire qu’aux personnes qui marchent. Il y a des avenues qui fonction...

Ecrire à Tokyo

  Depuis juillet 2020 … Ecrirea.tokyo est une initiative de dialogue sérieux mais pas austère qui réunit des personnes impliquées dans, curieuses de, ou intriguées par l’écriture, en langue française d’abord, avec Tokyo et le Japon en toile de fond, ceci à titre professionnel  ou non,  avec un rendez-vous mensuel sur Zoom. être publié n’est pas une condition qualifiante de participation, de même que le lieu géographique des participants est sans importance. Ecrirea.tokyo est l’occasion de consacrer deux heures de dialogue thématique par mois et puis s’en vont jusqu’au mois suivant sur des sujets analytiques et créatifs autour des écritures. même si certains participants sont des universitaires, Ecrirea.tokyo n’est pas académique. Les organisateurs en particulier et exclusivement sont des cancres. Ne soyez pas impressionnés par les sujets évoqués. Hormis la curiosité pour l’écriture, aucun diplôme n’est requis. Ecrirea.tokyo a pour ambition de créer du lien et développer d...

Perdu de vue

- Tu sais, l’arbre pas loin de la maison. - Ah oui, je vois! Nous ne nous sommes pas vus depuis 20 ans? Non, depuis 10 ans sans doute, la dernière fois à San Francisco quand il m’est arrivé cette étonnante et stressante aventure de m’être perdu au retour d’une courte promenade, totalement, littéralement perdu, de n’avoir pas su retrouver mon chemin, de n’avoir pas du tout noté quelques caractéristiques de la maison, de son pourtour immédiat, maison que j’avais quittée une demi-heure avant, démuni de numéro de téléphone à contacter, démuni de téléphone fonctionnel, sans le moindre indice de l’adresse. C’était je crois un dimanche. Tu m’avais dit d’aller voir la perspective du parc situé plus haut au sommet de la colline. Je passe sur les circonstances qui ont permis de finalement être remis sur le bon chemin, accompagné, mais cette expérience d’une perte totale de sens et de direction dans la ville fut une expérience d’incontrôlabilité aigue parfaitement déroutante, et unique. Comme de ...

Nous ne mourrons jamais

Un élu au sujet de sa ville se lamente sur l’impact des locations saisonnières.  L’âme de sa ville se transforme : c’était une vraie ville, elle avait une âme, elle devient une station balnéaire. Sauf que si l’on s’informe sur ce qu’est historiquement sa ville depuis le 19e siècle et jusqu’à maintenant, on apprend qu’il s’agit dès le début d’une destination de villégiature, d’une station balnéaire. Y a-t-il eu un moment où la ville récente dans le vécu de cet élu était plus ville que station? L’explosion des locations saisonnières n’aurait-elle pas dégradé “l’âme” très bourgeoise idéalisée des lieux transformés en zones d’hyperconsommation hédoniste à degrés de pouvoir d’achat variables, de marches incessantes, de terrasses et food courts débitant de la nourriture authentique industrielle, de chefs toniques poivre et sel venu de Paris qui ont fait Tokyo? Rien de cela à Asakusa. Pas de classes, juste des strates parallèles d’entertainment, des tempuras trop chers pour la qualité, pa...

Rentrée littéraire : jeudi 23 mai 2024

  C’est ce jeudi 23 mai 2024 que les 100 exemplaires d’Ecrire à Tokyo - Japon : d’autres récits, vont être réceptionnés à Paris encore fumants de l’imprimeur, sans doute fumeux. Pour Tokyo, il faudra encore attendre mais peu. Calaferte, cité par Joseph Andras dans Littérature et Révolution, J. Andras, K. Harchi, Editions Divergences, page 189 (putain de livre extra!) : “C’est un phénomène moderne, c’est les médias : je ne fais pas un rapprochement obligatoire entre le fait d’écrire et le fait de venir parler de ce qu’on a écrit. Merde, ils ont qu’à lire.” La page d’introduction et le lien vers le bon de commande, c’est ici. Achetez-le. 

L’inintitulé

 E est heureuse de retrouver son appartement en France, son chat, sa précarité. Plutôt cela que de revenir ici pour un autre chat, une autre précarité. Maniérismes de petite fille qui joue à se faire croire. Sa déprise du monde ralentit sa chute.  La lecture de Littérature et révolution, un dialogue entre Joseph Andras et Kaoutar Harchi est une lecture importante. Editions Divergences. Ce que font de bien toutes ces petites maisons d’édition. ####Enrichir son vocabulaire, enrichir ses phrases Je vois sur la vidéo N passer à la télé, à l’aise, maîtrisant l’espace et son sujet. Le journaliste le présente avec familiarité. Il dit : “Vous êtes maintenant retraité.” M le reprend avec un sourire de connivence : “Retraité ET heureux!”. C’est l’exacte même tirade qu’il m’avait dite devant un café à Paris. On a nos paquets de phrases ready made, prêtes à livrer, figées. Enrichir son vocabulaire, ses expressions. Echauffement : On peut tester enfin en tirs réels.  Vient déjà le tem...

Bientôt

 

Poésie visuelle japonaise 1684 - 2023

C’est un livre monde, à choisir en version cartonnée plutôt que souple. Un livre cartonné promet un monde à l’intérieur. Il l’y est. Editeur : Taylor Mignon, titre : Visual Poetry Japan 1684 - 2023. Un monde à plus d’un titre. D’abord visuel à travers des siècles, 500 ans à la louche. Un monde discret, révélation pour moi en tout cas d’une dynamique anglophone au Japon autour de la poésie au sens large. Un monde comme en parallèle, un pas de côté. Ça se passe dans le monde anglophone au Japon, pas qu’au sens géographique. Aussi un troisième monde parce qu’il me faut planter le décors de la rencontre de l’ouvrage. C’est J qui m’a tendu la perche, puis très rapidement s’est présenté le choix d’Amazon, mais par une lubie étrange, j’ai fait une recherche sur kosho.or.jp espérant bêtement y trouver une occasion, pour un livre qui vient de sortir, recherche qui m’a mené à la librairie Flying Books à Shibuya. A Shibuya of All Places! N’empêche que c’est là que le carte est entrée en jeu. J’ai...

Le Pharaon ! le Pharaon ! disaient toutes ces voix

####La littérature pour couler le Belem — Eh bien, quoi ? le Pharaon ! êtes-vous fou, Emmanuel ? Vous savez bien qu’il est perdu. — Le Pharaon ! Monsieur, on signale le Pharaon ; le Pharaon entre dans le port. ####Saitama J’ai demandé à l’infirmière qui m’accompagnait au sous-sol si elle était de Tokyo. De Saitama m’a-t-elle répondu. Je lui ai demandé s’il s’agissait de Saitama-ville ou de Saitama-des-champs. Ville m’a-t-elle dit. Il m’a fallu pas mal de temps, qui ne manquait pas, pour me souvenir du nom, Moroyama, et lui recommander exactement maintenant, en cette saison, cette promenade à travers des vergers de yuzus qui offrent un paysage de toute beauté étrangement européen. Elle ne savait pas au sujet des yuzus, mais Moroyama lui a évoqué quelque chose bien reçu cinq sur cinq. Il ne s’agissait pas pour moi de faire valoir ma géographie même si c’est souvent pris sous cet angle de la vantardise, mais bien d’espérer qu’elle et sa famille y aillent faire un tour bientôt. ####Trois, ...

Quelque chose a eu lieu

31 secondes de vent dans les bambous. Retour sur le chemin vers la rivière. Sur le premier tronçon une fois longés les champs, la nature folle, échevelée, protude sur le passage. Je croise successivement trois femmes, l’une très jeune. Dans le périurbain, on ne se salue pas en se croisant. Je comprends leur malaise, leur crainte. Hormis lors de la promenade des chiens il est rare de croiser quelqu’un ici. Ce savoir est basé sur une accumulation de promenades dans le coin qui ne sont pas récentes. Le paysage agréable, varié, devient alors soudain figé par la rencontre que l’on ne peut pas prévoir de loin, et il n’y a aucun chemin annexe pour s’éviter. Je fais symboliquement un pas de côté pour tenter de signifier qu’il n’y a rien à craindre. Ces rencontres rares ternissent la promenade.  Plus bas au niveau de la rivière, la municipalité a totalement changé d’acte. Des années se sont écoulées depuis la dernière crue majeure qui avait défoncé la promenade en terre battue, et même empo...