Trouvé, disparu, retrouvé
Bruit d’un navire fluvial sur le canal près d’Edogawabashi. Il faudrait se lever pour aller le voir, le prendre en photo au-delà du parapet qui cache à la vue justement le paysage du canal.
Une plaque commémorative…
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Travaux de construction du revêtement de la rive gauche de la rivière Kanda (partie 1) | Longueur des travaux : 190 m en amont | Construction achevée le 15 mai 1967 | Tokyo |
Des heures d’écoute de Vladimir Jankélévitch, recherche de L’irréversible et la nostalgie en ligne, et proprement du domaine du miracle, clin d’oeil suffira plutrôt que cette grandiloquence, l'apparition du livre sur une pile à la maison où je jurerais qu’il n’y figurait pas tantôt, lui qui était passé jusqu'à présent hors radar.
A noter pour le souvenir que quelques jours plus tard, le livre disparaît et une heure ou à peu près dans le ressenti est consacrée à sa recherche vaine. Présomption soudaine justifiée, il réapparaît en se baissant loin au fond sous le lit où on n’attendrait pas la présence de quoi que ce soit hormis un mouton de poussière ou un insecte désséché. Le soupir de satisfaction à retrouver un livre n’est-il que du même ordre que de retrouver son mobile égaré? Rien que cela?
La conséquence de ces heures d’écoute est que la lecture mentale sonne pendant un certain temps comme Jankélévitch. Alors bien sûr, il y a souhait que des voix se fassent entendre qui permettent de s'imbiber de la texture sonore d’un auteur même reconstituée pour engager à la lecture de textes cotons, ou qui résistent à la concentration, à l’embarquement, telle Virginia Woolf encore récemment abordé sans succès, cette fois-ci par le biais de A Room of Ones Own. Les tentatives de reconstitutions de voix sur la base de photos ou gravure de faciès datent au moins dans mon expérience des années 80, vue entendue à Tokyo justement.
Écoute d’un podcast de 2021, invité Alexandre Gefen. Plein de choses à grignoter. Quand passe un extrait d’une interview de Sartre à un moment, je note que celui-ci à propos de quelque chose débute sa réponse par la formule “Je ne sais pas si … mais …”. Il suffirait aux LLM de répondre parfois par “Je ne sais pas si … mais …” pour devenir encore plus faussement honnêtes.
Sur le flou, l’opaque dans le sens du pas clair, su et assumé, il y a de quoi creuser. A un moment, brève apparition d’Anaïs Nin que je reconnais de suite être la voix d’Anaïs Nin avant même que la présentatrice ne la cite. Nin qui signifie que l’écriture sert à supplanter la mémoire à laquelle elle ne saurait faire confiance. Entendre ainsi des voix présentes de personnes passées ne passe toujours pas de l’étonnement à la banalité. Ce serait même le contraire.
Ce matin, le sujet est attachements urbains et routines urbaines. Encore. Heureusement qu’encore. L’attachement est une intention, et il est bon qu’une lucidité se développe pour en faire un acte furtif, lucide donc et toujours plus, et stratégique, en ville. La routine, elle, peut se pratiquer sans attachement. L’attachement, sans tomber dans la grandiloquence (bis), démarre sur une émotion de l’ordre du coup de foudre ou ce qui pourrait glisser vers cela. Là très exactement, je me situe dans le flou, l’imprécis assumé, par difficulté exposée de m’exprimer de manière plus claire. Le tâtonnement écrit, l’écriture du tâtonnement plutôt que l’abstinence d’écriture par peur du ridicule, que provoquerait l’énoncé bafouillé. Rien trouvé encore sur le tâtonnement en écriture, l’écriture tâtonnée, son exposition graphique, sa mise en page imaginée mais rendu impossible par le traitement de texte.
Comment le traitement de texte traite le texte sinon que dans une médiocrité visuelle régimentée, ligne après ligne, bloc de chapitre après bloc de chapitre. Je ne veux voir qu’une phrase!
En aparté, même ici sur blogger, la justification à droite qui générait un effet visuel ludique ne donne maintenant que ce banal italique qui apparaît ou pas pour une raison inconnue. Figurer des paperolles est stupidement impossible.
Sur la ville, sur Tokyo, attachement diurne accru à la vulgarité de certaines ruelles de Shimbashi articulé autour d’une routine de déjeuner sur le pouce, un comptoir à sushi brut de brut, alors qu’à deux pas des jeunes filles dans la rue affublées d’oreilles de lapin, discrètes, alpaguent les mâles de passage mais sans ostentation. La transition bien connue sur l’avenue minérale anémiée en direction de Yurakucho mène au Tokyu Plazza Ginza, ses surfaces marchandes vides - bien fait, oui, mais pourquoi? - sa rutilance scabreuse, une autre dimension de la vulgarité ici pas attachante, comme démontrée lorsque en sortant, je vois sur une borne à écran de projection promotionnelle le clip aguicheur d’un bar VIP en étage avec pole danseuses.
Pas de tâtonnement dans la démarche qui a toujours un but, une direction, sauf quand vouloir observer un bâtiment, une devanture, et chercher alors une distance, un angle adéquate, attitude rarissime, pour soi-même y compris. Piste à investir.
Avez-vous déjà observer comment les toitures des galeries marchandes couvertes touchent les immeubles dont l’état d’immeuble même, de parallélépipède, est dilué au point que ce qui domine le regard et le floute, ce sont les devantures, une succession de devantures sans perception des volumes, ce qu’est exactement une rue factice de plateau de cinéma.