Page blanche

 


Plutôt que la page blanche comme justificatif, comme sabot de bloquage à l’écriture, pas un frein hein, vraiment un butoir, on peut citer Nathalie Quintane dans ce podcast en 2 + 1 morceaux sur la chaîne audio Cracker l’époque - deux sessions d’interview et une session de Q&R avec le public. 


“C’est très difficile d’être libre, quand on écrit, quand on fait de la musique. Parce qu’en fait, on est contraint de tous les côtés au fond. Parfois par soi-même, il y a une forme d’autocensure, manque de courage, tout le temps, finalement.”


Autocensure et manque de courage. Bien pâle est la page blanche en regard de ces deux données.



Dans cette même série est cité Christophe Hanna qui élabore sur la distinction entre public et lectorat. Le public d’un livre, par exemple, les Soixante-dix fantômes (choses vues) - La Fabrique, qui digère une partie des frais de dingues pour se faire envoyer un ouvrage hors de l’hexagone, est constitué de non-lecteurs qui abordent le livre par les discours autour du livre, les exégèses, les colloques et présentations en librairies ou via podcasts, sources qui peuvent éventuellement menés à la lecture. Le lectorat lui est constitué de personne qui on abordé l’ouvrage. Celui-ci mérite d’être précédé ou suivi de tout ce que l’on peut trouver de matériel annexe, associé. Il ne se suffit pas à lui seul. Le podcast suscité est un très bon matériau annexe.


Christophe Hanna cité donc pour la distinction public et lectorat, c’est très certainement le livre récent - octobre dernier - intitulé Sociographies - Une écologie des écritures. Nathalie Quintane précise que sa formation littéraire datant des années 80, elle ne suffit plus à aborder et tenter de comprendre les écrits contemporains. Le livre de Christophe Hanna semble assez abordable pour de la théorie littéraire, hors d’un bagage universitaire. C’est le livre pour lequel je cherche une mule, pas une tête de mule hein, mais une/un voyageuse/eur au Japon qui me l’apportera - livraison au domicile de cette personne - en échange d’un verre de saké et une excellente conversation à Tokyo.



Sur un poteau de la rue qui monte parallèle à Kagurazaka figure un poteau de béton au pied duquel se trouve lié par une cordelette un bouquet de fleurs peut-être artificielles. Cela fait des années que ce bouquet est remplacé puis oublié parce devenu moins remarquable ou évacué par les événements météo jusqu’à la prochaine installation. Pas loin de la maison aussi figure un poteau avec à l’occasion un bouquet lié au bas. Il s’agit très certainement de lieux d’accidents où quelqu’un s’est fait renverser et a perdu la vie. Cela fait des années donc que des personnes inconnues pour soi y ont perdu la vie. Près de la maison, c’est un petit carrefour, la jonction perpendiculaire de deux routes de largeur très standard figurant un feu, qui est clairement dangereux, surtout venant de la montée dans la direction ouest ou l’angle est en toute petit partie mort, qui fait qu’une voiture qui s’avise de passer à la dernière minute pour tourner à gauche va découvrir trop tard une personne qui traverse sans pouvoir s’arrêter.


Sur la montée parallèle à Kagurazaka, c’est d’une ligne droite dont il s’agit. Comment peut-on se faire écraser sur une ligne droite dans le sens de la montée sans aucune entrave à la visibilité? J’imagine que quelqu’un - ils étaient plusieurs - était sorti d’un restaurant proche le soir, avec la satiété et la joyeuseté alcoolisée de coutume, que cette personne n’a pas fait attention et s’est engagée sur la chaussée. Tout ceci est bien sûr de l’imagination.

Toujours est-il que sur la photo, jamais prise auparavant, se trouvent des éléments qui racontent une vie. Une sorte de porte-carte en plastique bleu souvenir d’un voyage en Malaisie, signe à l’attention de l’âme ou du souvenir de l’âme à jamais figées au bas du poteau lui signalant y avoir été, sans lui, sans elle. Mais vue la distance du porte-carte, il est aussi possible que celui-ci n’ait rien à voir avec le disparu, mais a été posé là, juste inséré dans l’interstice d’un collier métallique de serrage, à l’attention potentielle de qui l’aura fait tombé là par inadvertance.


Plus bas, ce n’est pas sur place mais en observant la photo que les détails d’autres objets sont apparus. Un petit flacon de la marque Maruzen, fabricant industriel d’une vaste gamme d’aliments et condimentaires, aussi en OEM, peut-être dans ce cas précis des champignons émincés aromatisés, ce qu’il ou elle aimait.


Une sorte de carte postale de ce qui apparaît être un temple avec quelques lignes explicatives au bas. 


Plus intrigant est ce livre, Sites of Japan Industrial Revolution, 72 pages, annoncé au format A4  mais plus petit apparemment, vu plus tard sur le site d’un libraire d’occasion mais non-disponible. Quel était le rapport entre la personne qui a perdu la vie ici et ce livre sur un chapitre estampilé UNESCO de sites industriels, avec un volet travail forcé, ou dit autrement esclavage? Etait-ce un sujet d’intérêt ou une certaine forme d’implication dans ce livre, ce programme? 


Quintane poursuit : “Exploiter les hasards à fond, jusqu’à ce que ça puisse consitituer une sorte de circuit qui tient par la langue, qui tient par le phrasé.”

Ces bouquets sont renouvelés tous les ans.